Procédures collectives : un recours inédit pour restaurer les droits bafoués des dirigeants en difficulté et des laissés-pour-compte du système judiciaire
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Paris, le 3 avril 2025 – Constatant des atteintes graves et récurrentes aux droits fondamentaux des dirigeants d’entreprises placées en liquidation judiciaire, ainsi que d’autres parties impactées par les procédures collectives, le Conseil National des Débiteurs (CNDD) a déposé, le 26 février 2025, un recours en reconnaissance de droits devant le Tribunal Administratif de Paris (DOSSIER 2505428 – CONSEIL NATIONAL DES DÉBITEURS – 4e Section). Représenté par Maître Mathieu Croizet, avocat au Barreau de Paris, le CNDD dénonce une organisation procédurale déséquilibrée, dans laquelle des dirigeants dessaisis se retrouvent privés de tout moyen effectif de défense, exposés à des décisions unilatérales, souvent irréversibles, sans accès équitable à la justice.
Protéger toutes les parties affectées
Ce recours dépasse la seule défense des dirigeants dessaisis. Il porte également sur la situation juridique et économique de l’ensemble des parties structurellement désavantagées dans les procédures collectives :
- Les créanciers chirographaires, fournisseurs ou sous-traitants, relégués en bas de l’ordre de paiement et souvent laissés sans indemnisation ;
- Les salariés lésés, dont les droits peuvent être compromis dans les liquidations longues, mal encadrées ou insuffisamment contrôlées ;
- Les clients d’entreprises en défaillance, souvent contraints à subir les conséquences d’un abandon contractuel sans recours ;
- Les associés et actionnaires minoritaires, totalement exclus des décisions de gestion de la liquidation, alors même que leurs apports sont engagés
Le CNDD rappelle que les procédures collectives, dans leur fonctionnement actuel, génèrent une inégalité manifeste entre les acteurs du redressement ou de la liquidation, en concentrant les leviers décisionnels entre les mains des organes de la procédure.
Un constat accablant : un déséquilibre systémique
Les procédures collectives, dans leur mise en œuvre concrète, révèlent un déséquilibre structurel et systémique au sein du dispositif judiciaire.
D’un côté, les organes de la procédure, en particulier les mandataires judiciaires, disposent de moyens juridiques, institutionnels et financiers étendus, avec des créances prioritaires systématiquement garanties (notamment par la Caisse des Dépôts et Consignations en cas d’insuffisance d’actif).
De l’autre, les dirigeants dessaisis – comme de nombreuses autres parties – se retrouvent dans l’incapacité d’agir, faute de ressources, de représentation ou d’accès effectif aux décisions les concernant.
Ce déséquilibre est aggravé par la stricte hiérarchie légale des créances, issue des articles L.643-7 et suivants du Code de commerce :
- Frais de justice et honoraires des mandataires (créances superprivilégiées) pris en charge en cas d’insuffisance par la Caisse des Dépôts et Consignations).
- Créances salariales couvertes par l’AGS.
- Créanciers garantis par des sûretés réelles (hypothèques, nantissements, gages).
- Créances fiscales et sociales (URSSAF, TVA, impôt sur les sociétés).
- Créanciers chirographaires (fournisseurs, sous-traitants, créanciers divers).
- Associés et actionnaires, dont les droits à remboursement sont purement résiduels
Dans les faits, ce classement aboutit à une exclusion quasi automatique des derniers rangs de créanciers, dont les créances ne sont jamais apurées, en dépit de leur participation active au cycle économique de l’entreprise.
Des conséquences dramatiques pour les dirigeants
Les dirigeants concernés par une liquidation judiciaire sont exposés à des atteintes graves à leurs droits patrimoniaux et extrapatrimoniaux, sans bénéficier de garanties procédurales effectives. Le CNDD alerte notamment sur les conséquences suivantes :
- Dépouillement total de leurs droits sur l’entreprise : le dessaisissement s’accompagne d’une perte d’accès à toute décision de gestion, sans possibilité de recours utile ni information complète.
- Impossibilité matérielle d’organiser leur défense : le blocage des comptes et des actifs empêche souvent les dirigeants de financer un avocat, un expert ou même une procédure d’appel.
- Priorisation systématique des créanciers dits “privilégiés”, reléguant de facto les dirigeants au rang de justiciables passifs, sans pouvoir d’agir.
- Poursuites personnelles fréquentes, en extension de procédure ou au titre de responsabilités pour insuffisance d’actif, mettant en péril leur patrimoine personnel et familial.
- Dégradation rapide de la situation psychologique : selon les données de l’Observatoire OSDEI, 66 % des dirigeants dessaisis signalent une détresse sévère ou un risque suicidaire, en lien direct avec l’impossibilité d’agir dans un cadre procédural trop contraint.
- Labyrinthe juridique inabordable pour les non-initiés, générant un effet d’éviction du droit, y compris lorsque l’aide juridictionnelle est accordée, celle-ci restant partielle, tardive, ou insuffisante.
- Défaillance du contrôle judiciaire et institutionnel : le parquet, censé garantir la régularité de la procédure, n’intervient que de façon marginale, et l’État reste absent en matière d’évaluation des pratiques ou d’accompagnement des justiciables vulnérables.
Ce déséquilibre, déjà annoncé dans le rapport de l’Observatoire OSDEI 2019 et le rapport d’information parlementaire n°4390, anéantit les dirigeants en difficulté, au lieu de leur offrir une chance de rebondir.
Une « machine à achever » les dirigeants et deni de justice.
L’objectif fondamental des procédures collectives – permettre le redressement ou organiser la cessation dans des conditions encadrées – semble aujourd’hui largement détourné de sa finalité initiale.
Dans une part croissante des cas, notamment les liquidations prolongées ou non clôturées, la procédure elle-même devient un facteur d’aggravation de la situation des dirigeants, au lieu d’en constituer une issue.
Le CNDD recense plusieurs dizaines de situations dans lesquelles des liquidations judiciaires restent ouvertes pendant 10, 20, voire plus de 40 ans, sans qu’aucun plan de clôture ne soit mis en œuvre, ni évaluation de l’impact humain réalisée. Cette durée indéterminée des effets juridiques sur les dirigeants et les autres parties prenantes constitue un déni de justice manifeste, contraire aux principes de proportionnalité et de sécurité juridique.
Dépossédés de leur outil de travail, dans l’impossibilité d’organiser leur défense, exposés à des procédures personnelles et souvent marginalisés par les institutions, les dirigeants concernés sombrent dans une forme d’exclusion judiciaire durable, incompatible avec les exigences d’un État de droit.
Un appel urgent à réformer la justice commerciale et les procécédures collectives
Face à ce déséquilibre structurel, le Conseil National des Débiteurs appelle à une réforme urgente et ciblée des dispositifs encadrant les procédures collectives et dans un cadre plus large, le droit des entreprises en difficulté.
Cette réforme doit reposer sur trois axes fondamentaux :
- La reconnaissance juridique de la qualité de partie directement affectée pour les dirigeants, associés, salariés et créanciers chirographaires, leur permettant d’agir dans la procédure à titre autonome lorsque leurs intérêts sont en jeu.
- La mise en place d’un fonds d’assistance juridique dédié aux justiciables dessaisis, financé à titre mutualisé ou par un mécanisme public de solidarité, afin de garantir un accès effectif à un conseil ou à une défense.
- Le renforcement du rôle de contrôle de l’État, par une présence effective du parquet dans les audiences clés, une traçabilité renforcée des décisions de gestion d’actifs, et la limitation dans le temps des effets d’une procédure non clôturée.
Au-delà des intentions, le recours introduit par le CNDD demande expressément l’allocation d’une enveloppe budgétaire spécifique, à destination des dirigeants et tiers impactés, pour leur permettre de faire valoir leurs droits dans un cadre contradictoire et équitable.
Il ne s’agit pas de contester l’utilité des procédures collectives, mais de rappeler que leur légitimité repose sur leur équilibre. Lorsqu’elles deviennent des mécanismes unilatéraux, elles perdent leur finalité économique et leur crédibilité judiciaire.
Rejoindre le CNDD pour défendre ses droits
Le Conseil National des Débiteurs invite l’ensemble des dirigeants concernés, mais également les parties impactées par les effets d’une procédure collective déséquilibrée – créanciers chirographaires, salariés, clients, associés – à se joindre à l’action engagée.
Le CNDD propose un accompagnement syndical, juridique et institutionnel pour structurer les démarches individuelles et collectives. Cette mobilisation vise à faire émerger un véritable droit à la défense dans les procédures économiques, là où il fait aujourd’hui défaut.
Brigitte Vitale
Présidente du CNDD
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📎 Annexes disponibles sur demande :
- Copie du RECOURS EN RECONNAISSANCE DE DROITS
Objet : Discrimination de l’accès au droit des chefs d’entreprise en difficulté et des parties prenantes aux procédures collectives – Tribunal Administratif de Paris. - Rapport OSDEI n°20190401 (03 avril 2019 – MAJ 08/06/2022)
Étude sur la situation des (ex) entrepreneurs et indépendants en difficulté dans le cadre du Comité d’Étude sur les Dysfonctionnements des Procédures Collectives (Commission Waserman). - Rapport parlementaire d’information n°4390
Mission d’Information Commune sur les entreprises en difficulté – mention de l’OSDEI pages 89 et 211.